NARRATIF
Ainsi donc, dans les semaines, voire les mois à venir, « on peut redouter une partition du Mali » ! Affirmation faite par le ministre français de la défense Sébastien Lecornu, le 11 octobre dernier. Une affirmation, que dis-je, une prédiction doublement grave. Car si cela devait arriver, M.Lecornu devrait nous expliquer si c’est dans une boule de cristal qu’il a lu cette information ou si il y a activement travaillé ? De même, si cela ne se réalisait pas, ministre de la défense qu’il est de son pays, il aura perdu toute crédibilité. Et c’est justement le discrédit qui risque de le couvrir.
Ce narratif est connu, annoncer l’apocalypse pour avoir été éconduit, et s’activer qu’à défaut de cette apocalypse annoncée, qu’il puisse y avoir un chaos indescriptible. On le sait, la communication, pour paraphraser la célèbre phrase de Carl Von Clausewitz (général et théoricien militaire prussien), ne serait-elle devenue aujourd’hui que le prolongement de la guerre par d’autres moyens ? Le narratif de certains responsables français tend en tout cas à le prouver. Une guerre communicationnelle qui a des racines aussi anciennes que celles des Balazans de Segou.
Les médias, nul besoin de le rappeler, sont des armes, et l’information c’est la guerre. Telle fut en tout cas la conviction de nombre de stratèges, dont Napoléon Bonaparte qui craignait, disait-il, davantage trois journaux que 10 000 baïonnettes. Les théoriciens modernes et responsables politiques de « l’infoguerre » poursuivent l’idée comme John Arquilla de la « Rand Corporation » pour qui « ce n’est plus celui qui a la plus grosse bombe qui l’emportera dans les conflits de demain, mais celui qui racontera la meilleure histoire ».
Et la meilleure histoire pour M.Lecornu, ce n’est pas le renvoi des militaires français, mais plutôt la partition du Mali. Derrière cette idée saugrenue de partition se cache en fait une volonté de voir sombrer ce pays rebelle au politiquement correct. En s’exprimant devant le Sénat français, Sébastien Lecornu semblait amnésique. Exit la bêtise de la partition du Soudan qui se débat encore contre les affres de la division ethnique et religieuse diaboliquement disséminée. Il en oublie aussi la scission de l’Éthiopie d’avec l’Érythrée et qu’on avait voulu plonger encore dans le chaos. Il feint de ne pas voir ce qui passe au Kosovo après l’implosion de l’ex-Yougoslavie… Les exemples sont légion.
Ce narratif, on le connait désormais. Sur l’autre rive de la Méditerranée, en plein cœur du Sahel, les mentalités ont évolué. Comme le disait Ticken Jah Fakoly « on a tout compris ». Et parce qu’on a tout compris, que nous avons opté pour notre propre narratif afin de bâtir notre avenir qui, malgré les nuages qui s’amoncèlent sur son chemin, sera radieux et va irradier le ciel des oiseaux de mauvais augure.
#Mali #Politique #Diplomatie
Credit: Salif Sanogo
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